Brevet de pilotage

Piloter un prestataire de recouvrement…

Vous avez tous déjà entendu maintes fois cette formule. Mais que signifie piloter ?

La définition du Larousse est la suivante : « Conduire un véhicule qui exige une certaine compétence technique ou sportive. Guider quelqu’un dans un endroit que l’on connaît bien : Piloter des touristes dans un musée ».

Quel que soit le cas, vous gardez le contrôle, la maitrise de ce que vous « pilotez », ce, grâce aux instruments de bord qui fournissent les indications nécessaires et suffisantes. Vous vous reposez sur la fiabilité de ces instruments et en règle générale vous avez raison de le faire car si les voitures les trains et les avions circulent, volent et arrivent à bon port c’est qu’a priori (et même a posteriori) ces instruments sont fiables.

Or bien souvent, lorsque vous confiez vos dossiers de recouvrement à votre prestataire vous estimez que c’est à lui de jouer, qu’il va faire « sa cuisine » et que vous n’aurez plus qu’à lettrer les encaissements en gardant un œil sur le pourcentage de recouvrement atteint pour vérifier qu’il est conforme aux promesses du dit prestataire.

Oui mais, me direz-vous, le prestataire met à notre disposition un accès extranet qui nous permet de visualiser le traitement de nos dossiers en temps réel !
Certes, l’argument technologique a de quoi rassurer, si ce n’est anesthésier…
Si je compare ce fameux extranet à un verre, il est le contenant.
Le contenu peut être du vin du meilleur cru comme de la vulgaire piquette. Avez- vous bien pris le temps de le goûter ?
Les commentaires sur l’état d’avancement de vos dossiers sont-ils des commentaires « types » ou bien sont-ils adaptés et détaillés selon chaque cas spécifique ? Autrement dit, ce que vous lisez est-il généré automatiquement par l’outil informatique du prestataire ou bien est-il le fruit d’un travail manuel d’un rédacteur en contact étroit avec votre débiteur ?
Avez-vous accès aux détails et dates des actions menées ainsi qu’aux informations collectées auprès de vos débiteurs ?
Autrement dit, le compteur que vous observez vous donne-t-il la bonne mesure ? Dans l’affirmative, c’est déjà un bon début.

Mais encore, avez- vous accès aux échanges de courriers et notamment aux lettres émanant de votre prestataire ?
Pourquoi faire ? Simplement pour vérifier les sommes que celui-ci réclame réellement à vos débiteurs. En plus du principal, il est possible que votre fournisseur rajoute des accessoires au mieux farfelus au pire illégaux à ses lettres de relance.
Que se passe-t-il lorsque l’un de vos débiteurs paye l’ensemble des sommes ainsi réclamées ?
Vous sont-elles reversées ? En avez-vous-même simplement connaissance ?
La répartition des sommes accessoires recouvrées est-elle prévue contractuellement avec votre prestataire ?
L’article 12 de la loi du 17 mars 2014 dispose: « Le fait pour un professionnel de solliciter ou de percevoir d’un consommateur des frais de recouvrement dans des conditions contraires au deuxième alinéa de l’article L. 111-8 du code des procédures civiles d’exécution est puni des peines prévues à l’article L. 122-12 du présent code » soit deux ans d’emprisonnement et jusqu’à 300 000€ d’amende.

En tant que Mandant, vous risqueriez même de voir votre responsabilité engagée conjointement avec celle de votre prestataire.

Si vous souhaitez rester à la manœuvre et réellement piloter votre prestataire, apprenez à interpréter correctement les instruments de bord.

A défaut, vous « externalisez » ou « sous-traitez » mais en aucun cas ne prétendez piloter.

Eric Ermantier

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